- Types d'acteurs : Aide familiale
- Type d'acte : Toilette
- Thème(s) : Abus de pouvoir
- Concept(s) : Expérience, Gouvernante, Rites d’interaction
- Lieu d'observation: Domicile
- Région d'observation: Bruxelles
- Pseudo: Mr Plissart
- Date d'observation: 02/06/2015
- Numéro de page du livre : 156
- Auteur du récit : Natalie Rigaux
Clara sonne. Monsieur vient nous ouvrir, en chemise et caleçon long. A peine le temps de dire bonjour et Clara le somme : « On va à la salle de bain prendre une douche. On se déshabille. Votre fille et le médecin viennent aujourd'hui ! » Comme Mr Plissart obéit sans broncher, Clara me souffle en ouvrant les tentures : « Je ne comprends pas comment les collègues n'y arrivent pas ! Ce n'est pourtant pas compliqué ! ». Pendant le temps de la douche, le chien et moi restons dans le couloir. Ce que j'entends est affligeant. Sauf au moment de l'habillage où il se taira, Mr Plissart va grommeler de façon inintelligible tout le temps que dure l'opération. De cette basse (quasi) continue ressort à intervalles réguliers la voix forte et irritée de Clara : « Arrêtez de rouspéter de Mr Plissart, on entre dans le bain ! » ou « On fait les cheveux aussi, mettez la tête sous l'eau » et plusieurs fois « Fermez votre bouche, Mr Plissart, le silence nous fera du bien ». A un moment : « Faites vos parties intimes, Mr Plissart et votre anus ! Votre anus ! Encore, il est encore plein de caca ! Frottez encore avec le gant de toilette ou je le fais moi-même ! » C'est à ce moment-là que Mr Plissart explose, avec une phrase tout à fait compréhensible celle-là : « Mais foutez-moi la paix à la fin, merde ! » Clara : « Gardez le « merde » pour vous, Mr Plissart, un peu de respect s'il vous plait ». Lui : « Mais c'est vous qui me manquez de respect ! « . Elle « Non, c'est vous ». A certains moments, elle dit aussi : « Anne-Françoise vient tout à l'heure, je lui dirai que vous ne voulez plus vous laver. Vous verrez quel effet ça aura ! » A toutes ces interpellations répondent les grommellements hostiles mais indistincts de Mr Plissart. Le chien est couché en travers du hall. De temps à autre, il me regarde. J'ai le sentiment qu'il partage mon abattement. (…) Quand Mr Plissart me rejoint dans la cuisine, je lui demande d'une voix chaude, comme pour le réconforter après cette épreuve : « Comment allez-vous, Mr Plissart ? » Lui : « Je suis bien quand je suis seul chez moi, qu'on ne m'ennuie pas. » Moi (fadasse !) : « Vous aimez la solitude ? » Lui : « Ce n'est pas ça… » Clara nous interrompt. Je devrai attendre de sortir avec lui et le chien pour l'entendre à nouveau.