- Types d'acteurs : Chef.fe d'équipe, Garde à domicile, Proche
- Type d'acte : Présence
- Thème(s) : Fin de la demande d'aide
- Concept(s) : Agentivité, Expérience
- Lieu d'observation: Domicile
- Région d'observation: Bruxelles
- Pseudo: Mr et Mme Vandaele
- Date d'observation: 2012
- Numéro de page du livre : undefined
- Auteur du récit : Natalie Rigaux
Lorsque je la rencontre à l'occasion d'une réunion deux mois après l'institutionnalisation de Mr, la responsable de l'équipe de gardes me raconte :
J'ai appelé Mme alors qu'on était en réunion d'équipe pour avoir des nouvelles. Mme m'a dit que ça leur ferait plaisir de venir nous dire au revoir. Ils sont venus à deux. C'était super émouvant. Tout le monde pleurait.
Mme Vandaele me raconte spontanément le même épisode, lors du second entretien :
Il faut que je vous raconte ! Alors que mon mari était tout à fait exceptionnellement venu passer une nuit à la maison parce qu'il avait deux rendez-vous médicaux qui se suivaient, l'assistante sociale m'a téléphoné pour demander des nouvelles. J'avais prévenu le secrétariat que mon mari était placé mais je ne l'avais pas eue elle personnellement. Comme les gardes avaient envie de le revoir et que lui était d'accord, on y est allé. Ça a été incroyable, j'en ai les larmes aux yeux (des larmes coulent). J'ai eu l'occasion de dire à chacune ce qu'elles avaient apporté, avec leur personnalité particulière, comme attention à mon mari. Pour moi qui n'avait absolument pas préparé cela, qui ne comptait pas faire de démarche particulière, j'ai eu ainsi la possibilité de les remercier, chacune, pour ce qu'elles avaient faits. Ça a été un moment formidable. Elles aussi ont été très heureuses…et très émues. Elles ont dit aussi ce qu'elles appréciaient avec lui, les bons moments qu'elles avaient eus. C'est incroyable comme cela s'est mis, la seule fois où il rentrait à la maison !
Cet épisode permet d'abord de réaliser que les gardes n'ont pas eu l'occasion de dire au revoir à Mr et Mme Vandaele, suite à l'entrée en MR précipitée de celui-ci et n'ont plus eu aucunes nouvelles. Alors que cette situation a demandé d'elles de dépasser leurs craintes face aux incidents réguliers lors de leur passage (du fait de ses troubles, Mr Vandaele s'en prenait régulièrement aux passants en provoquant des bagarres avec certains d'entre eux), rien n'a été fait pour boucler véritablement ce moment de leur engagement professionnel (que ce soit par des adieux, des remerciements ou simplement des nouvelles). C'est à leur demande que la cheffe d'équipe va reprendre contact avec Mme Vandaele. Dans le récit de la cheffe d'équipe, c'est Mr et Mme Vandale qui veulent les revoir, dans celui de celle-ci, ce sont les gardes qui le souhaitent : peu importe, la rencontre a lieu. Tant Mme Vandaele que les gardes en sont profondément heureuses et touchées : Mme pour avoir pu remercier chaque garde pour son apport singulier, celles-ci pour recevoir cette reconnaissance et exprimer la leur à l'égard de Mr Vandaele. On peut imaginer que pour lui aussi, ce moment a dû être précieux. Ce qui contribue sans doute à le rendre si magique pour les gardes, c'est de découvrir l'attention individuelle que Mme Vandale leur a portée, dans leur souci pour son mari et d'en témoigner. On réalise par contraste ce qu'il y a de dur pour les professionnel·le·s du soin de voir leurs prestations chez une personne s'achever sans au revoir ni merci, comme si celles-ci n'avaient pas exigé d'elles un engagement personnel et un attachement aux personnes méritant reconnaissance. Et on se plaît à rêver de la mise en place de rites d'au revoir, chaque fois que cela est possible, entre la personne dont il a été pris soin et les professionnel·le·s.